Publié le 11 décembre 2023

Michel Valentin

Nombre d’entre vous ont navigué avec lui. Michel Valentin est décédé le 23 octobre dernier.

Voici un court extrait de l’hommage qui a lui a été rendu :

« Mich. Ta disparition lève une belle grosse houle. La mer du vent, gonflée de ta présence.
On ne sait pas quelle part de ta vie occupait l’AJD. Tu es un homme discret, même secret pour nous.
Quand tu embarquais, tu étais heureux.
Tu es arrivé à l’asso, poussé dans le dos par ton vieux complice Jean-Paul. Il t’avait convaincu de venir là pour purger une condamnation à des heures de travaux d’intérêt général. Des tiges, puisque tu avais fait le délinquant. Les flics t’avaient arrêté, tu téléphonais au volant. Tu leur avais dit de patienter, tu devais poursuivre cette conversation. Ça n’avait pas plu, il faut croire. Alors, tu avais embarqué comme commandant. Question qualifications, tu n’avais rien à démontrer.
De ta longue expérience dans le remorquage, tu gardes une affection particulière pour les moteurs Baudouin des bateaux. Au moyen de ton flegme, tu es capable de faire un créneau dans le port de Brest, entre l’énorme Abeille à quai, et un bateau immense, pourvu d’un bout-dehors menaçant. Tu as rangé les 40 mètres du Rara Avis à quai, sans une égratignure, et sans prononcer un mot. Un artiste du Baudoin , en fait.
Question superstitions, tu surclasses tout le monde. A Sein, l’équipage, descendu à terre, rencontre des chasseurs. Il y avait une invasion de lapins à contenir. L’équipier qui revient à bord, tout fier de ramener de quoi cuisiner un repas de roi, te connaît mal.Ton sang n’a fait qu’un tour. Le sac de lapins, tu l’as bazardé par-dessus bord. A l’équipier, tu as bien fait comprendre qu’il y a des choses dangereuses qu’il ne faut jamais faire dans la vie.
Ta pédagogie ne s’arrête pas à l’enseignement des superstitions que tout marin doit respecter. C’est simple. Personne ne t’aime pas. J’ai bien vérifié. Tous ont dit ta douceur, ta patience, la confiance que tu leur offres. Et ton sourire franc, un poil moqueur, mais tellement encourageant.
Ah. Il y a ton humour, aussi. Comment le décrire ? Je dirais que c’est comme si tu ouvrais des trappes dans le vide. On se fait avoir à chaque fois.
Et tes clopes, évidemment.
Si tu retrouves Michel Jaouen là où tu es, tu vas vite oublier de ronchonner que ce n’est pas comme ça que tu croyais les choses. Si ça se trouve, il y aura aussi Jean-Paul.
Démerdez-vous pour continuer de nous porter. »